La Roumanie d'aujourd'hui ne s'est pas construite à la manière des Etats-nations de l'Ouest ni au même rythme qu'eux. Cette histoire particulière impose de parler non d'une histoire de la Roumanie, mais d'une histoire des Roumains. C'est pourquoi la reconstitution d'une architecture de la mémoire, de la conscience collective permet d'éclairer les structures, les repères et les fractures du temps présent mieux que ne le ferait un récit linéaire strictement événementiel.
Le livre est construit autour des temps forts, des appartenances acceptées ou rejetées au sein d'un environnement géopolitique marqué successivement par l'apogée et la chute des empires romain, byzantin, ottoman, Habsbourg, russe, soviétique, dans un cadre territorial mouvant. Dès lors, c'est le cheminement du sens et des modalités de l'accession des Roumains à la modernité et à la souveraineté qui guide le choix des séquences. Le lecteur suit le tracé d'un questionnement _ de quelles expériences se nourrit la roumanité? _ dans un climat où le malheur et l'euphorie alternent pour composer une musique identitaire.
La roumanité s'est développée comme une identité réactive, dans une tension relationnelle avec l'Ouest, avec l'Orient, avec la Mitteleuropa comme avec les Balkans. Percevoir et comprendre cette obsédante tension, voilà la meilleure manière d'entrer dans le temps des Roumains.
Agrégée d'histoire, professeur à l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO), Catherine Durandin s'est spécialisée depuis de longues années dans l'étude de la Roumanie, à laquelle elle a consacré plusieurs ouvrages.