Les choses aujourd'hui banales ne l'ont pas toujours é té . De l'alimentation à l'habitat, la vie de nos ancê tres é tait conditionné e par les excè s ou les insuffisances de la nature, et les objets qu'ils utilisaient chaque jour passaient d'une gé né ration à l'autre, sans que nul ne songe à en acqué rir de nouveaux. C'est à une vaste ré flexion sur le passage de cette socié té traditionnelle à la socié té moderne que nous invite ici Daniel Roche. Les changements sont perceptibles bien avant la Ré volution. Dè s le XVIIe siè cle, l'exemple des villes et des riches, le dé veloppement des é changes commerciaux, la multiplication des innovations et des inventions commencent à bouleverser le rapport que les hommes entretiennent avec les objets. Les exigences et les sensibilité s de chacun é voluent. Peu à peu, car tous nos besoins se tiennent ", les modes de vie vont se transformer: les maisons et leur ameublement, leur chauffage et leur é clairage; les vê tements et la nourriture, sous l'effet de l'accé lé ration des modes et de la monté e du goû t; ou encore les usages de l'eau, lié s à un souci d'hygiè ne croissant. Autant de changements dans la vie maté rielle qui sont les pré misses de la socié té de consommation, et dont les ré percussions sont aussi bien sociales que politiques. L'homme entouré d'objets n'est-il pas prisonnier, se demande Rousseau? A peine apparaissent les premiers signes de l'accroissement de la production que dé jà s'engage un dé bat sur la valeur morale des choses, sur l'é cart qui se creuse entre le dé veloppement du commerce et de l'industrie, gage de la civilisation, et le recul des solidarité s entre les hommes. Daniel Roche est professeur à l'université de Paris-I et directeur d'é tudes à l'Ecole des Hautes Etudes en sciences sociales. Auteur de plusieurs ouvrages sur les Lumiè res, en particulier Les Ré publicains des Lettres (Fayard, 1988), La Culture des apparences (Fayard, 1989) et La France des Lumiè res (Fayard, 1993), il a reç u le Grand Prix national d'histoire pour l'ensemble de son oeuvre."